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::D I S C O H I S T O R Y::
Diana Ross

::1976:: Tout a commencé avec Philly. Dans les années soixante, Motown a été le premier label majeur de soul et son catalogue était prestigieux (Diana Ross, The jacksons 5, The Temptations, Marvin Gaye, etc.). Motown a posé les fondations de ce que serait la musique noire des décennies à venir, semant dans le monde entier des joyaux scintillants et jetant ses derniers feux dans “High Energy”, des Supremes. Mais, tandis que Motown régnait sur Detroit, Kenny Gambie et Leon lluff ont fait de leur ville natale, Philadelphie, le centre d’un nouveau genre musical. Luxueux, riche en arrangements et en innovations mélodiques instantanément reconnaissables, marqué par des messages souvent sociaux et des tonalités parfois jazzy, le PhilIy Sound a changé àjamais la façon dont la musique noire américaine serait perçue. Tout à coup, le public blanc s’est mis à acheter les disques noirs des Three Degrees, d’Harold Melvin & The Blue Notes et de Teddy Pendergrass.

Dès sa création, en 71, le catalogue de Philadelphia International Records était très dirigé vers les clubs. Dans une certaine mesure, PIR était plus cheap que Motown et ses artistes n’avaient pas le côté glamour intouchable des Supremes ou l’aura de Marvin Gaye. Les grandes stars de Philly étaient les O’Jays, MFSB, Billy Paul, Patti LaBeIle, The Trammps, Dexter Wansel, The Philadelphia All Stars, McFadden & Whitehead, Phlliis Hyman, Jean Carn, The Intruders et les Jones Girls... Tout au long des années soixante-dix et même pendant les années quatre­vingts, le son Philly va évoluer et influencer la disco, la pop anglaise (notamment Stock, Aitken & Waterman) et les courants underground américains (house et vogueing).

Son impact sur le circuit des clubs européens a été aussi déterminant que sur l’émergence de la Northern Soul anglaise. Au centre de ce catalogue, Gamble & Hull composent les tubes les uns après les autres. Parmi leurs plus grands hits, on se souviendra du classique qu’est devenu “Don’t Leave Me This Way” d’Harold Melvin & The Blue Notes, “Love Train” et ( “Backstabers” des O’Jays, “Me And Mrs Jones” de Billy PauI, “Take Good Care 0f Yourself’ des Three Degrees, “Love Is The Message” de MFSB, “Dance Turned Into Romance” des Jones Girls, etc., des morceaux qui ont été repris maintes fois.

Leur signature était synonyme de succès et de sophistication technique, un peu comme les célèbres studios Sygma Sound, qu’ils ont créés à Philadelphie et qui sont devenus les symboles de la création soul, exactement comme le Power Plant l’a été pour le rock.

Cependant, la vraie naissance de la disco telle que nous la connaissons est pratiquement due à une seule personne, Giorgio Moroder. A la même époque, à Munich, un producteur totalement inconnu a le premier l’idée saugrenue et vaguement sacrilège de marier des voix soul, parfois même gospel, à des arrangements électroniques et des mélodies blanches.

Moroder est un fou d’électronique. Il travaille étroitement avec un ingénieur avec qui il passe ses nuits à inventer des sons synthétiques. Très vite, ses productions mettent la disco naissante au rang de musique expérimentale. Les premiers disques de Donna Summer ne ressemblent à rien d’autre. Dans les clubs du monde entier, la voix orgasmique de Donna glisse sur les seize minutes de son premier tube, “Love To Love You Baby”, tandis que l’autre morceau épique de cette même année, “Try Me, I Know We Can Make It” fait dix-huit minutes. Ces deux chansons, conçues sous forme de “suites” dont la durée pour le moins inhabituelle constituera une sorte de marque de fabrique de ce Munich-Sound naissant, sont volontairement construits avec des préliminaires, des montées, des pauses, une explosion finale et un fading sur lesquels s’épanouissent les soupirs et les râles, qui forment tout simplement une métaphore du sexe. Inutile de dire que, dès sa création, la disco sent le soufre...

En l’espace de quelques mois, Donna Summer est sacrée reine de la disco. Partout on critique cette récupération obscène de la misère sexuelle universelle, mais les ventes de ses disques ne s’en portent que mieux. Elle est scandaleuse et expatriée. Elle est noire, mais elle n’est pas soul c’est un produit inclassable. Si Moroder est le concepteur de la disco, avec son album “Knights In White Satin”, également conçu comme une suite qui serait la version mâle de celles de Donna Summer, son succès coincide néammoins avec le bourgeonnement soudain des boîtes de nuit en Europe.

A partir des 70’s, des clubs apparaissent un peu partout, dans les villes comme dans les champs. La relation Moroder/ DJ est complémentaire, car tous deux arrivent sur le marché en même temps, avec un effet idéal de good timing. C’est parce que les boîtes s’ouvraient qu’un marché disco a pu éclore, c’est parce que les producteurs de disco créaient une musique conçue pour les sonos que ces boîtes ont bien fonctionné.

L’Europe est alors leader. L’Allemagne produit un trio féminin d’une extraordinaire vulgarité, Silver Convention, dont les costumes de strip-teaseuses façon Far-West n’ont rien à envier en indigence aux morceaux qu’elles interprè­tent, “Fly, Robin, Fly” et “Lady Bump”, deux objets-cultes dont les violons stridents n’en finiront pas de hanter — ou mieux, d’inspirer — ceux qui voyaient, atterrés, les dames gesticuler la danse la plus invraisemblable qu’ait produit la disco le bump, qui consistait, avec plus ou moins de sophistication, à se cogner réciproquement le cul. Une danse qui aura également servi pour le “Shame, Shame, Shame” de Shirley & C0 — Shirley était une très grosse noire et CO un petit type très maigre. En France, Cerrone sort "Love In C Minor” et l’album se vend à cinq millions d’exemplaires — rien qu’en Europe. Jean-Marc Cerrone allie des pochettes de disques soft-porn effrayantes à une merveilleuse limpidité musicale, sans oublier ce beat de grosse-caisse qui est désormais inséparable des productions disco. Son public est beauf’ mais il symbolise parfaitement la réussite disco. Ancien coiffeur, il devient un producteur manitou et va servir d’exemple à l’industrie du disque, surprise par le succès disco.

Dans un sens, la disco de 76 n’est pas encore définitivement formée. Elle est en transition entre la période Philly, qui a marqué des succès comme “This Is Lt” de Melba Moore ou “That’s The Way (I Like Lt)” de KC & The Sunshine Band, et — même si certains titres comme “Never Can Say Goodbye” de Gloria Gaynor (75) sont très disco — les arrangements avant-gardistes qui apparaîtront un an plus tard. Le monde musical est partout en pleine ébullition intellectuelle. A New York et à Londres, le punk est sur le point d’exploser. L’album “Main Course” des Bee Gees et “Young Americans” de David Bowie (enregistré aux studios Sygma Sound de Philadelphie, en 75) ont initié un public blanc à des sonorités soul, à tout une culture noire et jive, celle des boîtes new-yorkaises, des clappings et des bijoux en or, qu’on retrouve, en beaucoup plus authentique, dans le subliminal “I Want You” de Marvin Gaye.

::1977:: Et soudain c’est l’explosion. La disco est partout, dans les clubs, dans les magasins d’imports, sur les T-shirts des filles, à l’école et au drugstore de St-Germain-des-Prés. Le monde entier est pris par la “Safurday Night Fever” et on suppose que Robert Stigwood, le manager des Bee Gees, est l’homme le plus riche de la planète. Filmé au 2001 Oddissey, un club minable de Brooklyn, l’extravaganza musicale qu’est “La Fièvre Du Samedi Soir” pulvérise tous les records de vente. Pourtant, si le double-album est le déclic médiatique et commercial, il ne représente que le dessus de l’iceberg, car 77 est une année hyper-productrice. Toutes les majors ouvrent des labels de dance-music et on ne compte plus les tubes qui se vendent, à l’époque, à des centaines de milliers d’exemplaires “Daddy Cool” de Boney M, “Don’t Leave Me This Way” de Thelma Houston, “Shame” d’Evelyne “Champagne” King, “Don’t Let Me Be Misunderstood” de Santa Esmeralda, etc. Aux USA, en novembre de cette année, Peter Brown est le premier artiste à sortir un titre — “Do You Wanna Get Funky With Me” — qui dépassera le million d’unités.

En Europe, le son de la disco devient nettement plus électronique. Tout en continuant à produire d’autres artistes (Roberta Flack, “Zodiac”) et en montant la Munich Machine, un projet qui réunit producteurs et artistes et qui sera à l’origine de ce qu’il faut bien appeler le Mùnich-Sound, Giorgio Moroder sort “From Here To Eternity”, sans conteste son meilleur album à ce jour (qui, sur la pochette, précise soigneusement et insolemment, à l’heure où les synthétiseurs sont aussi peu en odeur de sainteté, que “seuls des claviers électroniques ont été utilisés sur cet album”) et Donna Summer récolte un nouveau hit avec “Once Upon A Time” d’où sont tirées les perles computérisées que sont “Working The Midnight Shift” et “Now I Need You”. Ce double-album, sauvagement conceptuel et incroyablement mégalo, raconte l’histoire-conte-de-fées (authentique ou non) de la pauvre fille qui travaille en usine, qui économise pour sortir le soir, qui rêve de devenir une star et qui y parvient — mythe typique de l’époque, déjà exploité par le film “Saturday Night Fever”.

Pourtant, le mythe a sa part de réalité la disco donne à chacun la chance de devenir une star, ne serait-ce que le temps d’une nuit. Le monde de la disco est factice miroirs, chaussures achetées à grand prix, parfum, faux bijoux scintillants. La disco incarne dans la musique le rêve américain du self-making et le disque de Donna Summer ne dit rien d’autre que: Cette histoire est la mienne. Aujourd’hui, elle peut être la vôtre, si vous l’écoutez, si vous dansez dessus. Toujours en Allemagne, Kraftwerk abasourdit le monde entier avec “Trans Europe Express”, un album-concept saturé de sonorités révolutionnaires, dont le rythme du TEE qui se trouvera, quelques années plus tard, à la source du son hip-hop de Soulsonic Force.

La France est alors dans une position de pointe, Cerrone confirmant son succès de l’année précédente avec “Cerrone’s Paradise” et “Supernature”. Patrick Juvet réussit un tournant de carrière inspiré avec “Paris By Night”. produit par Jean­Michel Jarre. Mais c’est surtout Jacques Morali qui fera de 77 son année. Le premier album des Village People (“Hollywood”) paraît et devient le premier hymne militant des discos gays de la rue Sainte-Anne à Paris, du Pimm’s au Colony en passant par le Sept, le fief de Fabrice Emaer, où chacun se doit d’être vu. La frénésie de composition de Morali ne s’arrête pas là et l’album de Ritchie Family, “African Queens” catapulte un monster-hit avec “Quiet Village”. En définitive, on peut se demander ce qui a pu contribuer àtant de révolutions musicales. Cela peut paraître franchement ridicule, mais il serait presque possible de faire une analogie entre le 68 politique et le 77 musical.

.Cette année, le rock est bousculé par le punk, la soul par la disco et l’électronique par Kraftwerk. Se produisent alors à deux événements majeurs. D’abord, c’est l’expansion fantastique d’une disco jusqu’à lors presque réservée aux clubs (secrète, européenne) vers une disco de radio (jeune, mondiale). C’est l’effet “Saturday Night Fever”. Une nouvelle génération se met à sortir et les musiques jouées dans ces clubs évoluent très vite. Les DJs programment de moins en moins ces musiques simili-brésiliennes-Club Med qui sont à l’époque le cliché des boîtes provinciales. Le glamour de Tamla, avec ses chanteuses trop connues et pas assez malléables, fait place à une disco faite à la chaîne, dont les chanteuses sont inconnues et dont d’ailleurs personne ne se soucie. Tout se passe soudainement comme si la disco, par une surenchère de production qui étonne tout les observateurs — on s’attend à voir mourir le phénomène chaque trimestre — devenait un genre de musique aussi insondable et difficile à connaître que, disons, le jazz ou les musiques folkloriques. C’est alors que commencent à apparaître les maxis. Les gens les considèrent d’abord comme une pure arnaque (les maxis offrent la même durée de musique qu’un petit 45T sur la surface d’un 33T), avant de comprendre que le maxi permet un enregistrement plus précis (les sillons sont plus espacés) et plus fiable, bref un meilleur son pour les discos. A cette époque, le maxi comporte généralement sur les deux faces la même version de la chanson. Il n’est pas encore question de remixage ni de la future multiplication inflationniste des versions, même si en 79, The M. sort un maxi à la pochette Bébé Cadum, “Pop Muzik”, qui comporte deux sillons exactement l’un à côté de l’autre sur la même face — et deux chansons différentes...

Le deuxième événement est surtout intellectuel. La grande découverte de la disco, c’est que, pour la première fois dans l’histoire de la musique populaire, on se met à utiliser à outrance le deuxième degré et la disco peut être considérée à elle seule comme la responsable de l’état d’esprit musical génialement ringard de ces quinze dernières années. Auparavant, tout dans le rock était sincère, conçu pour provoquer ou séduire, au premier degré. Même les plus cyniques comme les Sparks, Zappa, Bowie ou Kraftwerk, étaient malgré tout sincères. La disco avance au contraire l’idée du ridicule positif, de la muzak facile à vivre, de la joie un peu idiote. Pendant les années soixante-dix, on refusait certains groupes parce qu’ils étaient “trop commerciaux” mais la disco récupère l’esprit pop des années soixante, quand il fallait faire le tube, avec tous les excès de promo possibles. Ainsi, la disco n’a pas de conscien­ce politique, seulement une conscience sexuelle — et encore Ce point est important. On se demande pourquoi certains écoutent, même aujourd’hui, des disques aussi extrêmes que “Doin’ The Best That I Can” de Bettye LaVette si ce n’est par pure bathmologie ou par dérision. Think about it.

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