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::1978:: Si 77 voit l’avènement de la disco, 78 est l’Année des Classiques. La période est à la production des hits, tous aussi brillants les uns que les autres “Hot Shot” de Karen Young, “Instant Replay” de Dan Hartman, “I Can’t Stand The Rain” d’Eruption, “Spank” de Jimmy “Bo” Horne, “Boogie Oogie Oogie” de A Taste 0f Honey, “Le Freak” de Chic, “If My Friends Could See Me Now” de Linda Clifford, “Victim” de Candi Staton, “Which Way Is Up” de Starguard, “In The Bush” de Musique, “Baker Street” de Gerry Raferty et l’incomparable “You Make Me Feel (Mighty Real)” de Sylvester, qui sera le début d’une carrière galactique et camp à la fois. Pendant ce temps, Donna Summer aligne trois tubes majeurs en l’espace d’un an “Last Dance”, “Mac Arthur Park” et “Heaven Knows”.
C’est l’époque de l’ouverture des grands clubs (Le Palace à Paris, le Studio 54 à New York, Heaven à Londres) qui imposent le concept des clubs mixtes dans lesquels gays et hétéros, jeunes et vieux se mélangent. C’est aussi l’apparition des clappings et des exhortations à la danse la majorité des disques ont des titres comme “Jump To The Beat” de Stacy Lattisaw, “Let’s All Chant” de Michael Zager Band ou “Disco Heat” de Sylvester, qui attirent les foules vers les pistes de danse. Les gens ne sont pas habitués à danser, il faut les initier! 78 est donc une période tremplin pour les DJs et les gens vont dans certains clubs pour entendre les DJs autant que pour s’amuser. Le mythe du DJ prend racine. Celui-ci possède un savoir irremplaçable et les producteurs lui dédient leurs disques (“#1 DJ” de Goody Goody, par exemple) tandis que les maisons de disques le recouvrent de cocaïne pour l’acheter.

On s’aperçoit de plus en plus que la musique est le nerf d’un club, qu’elle conditionne les clients et que les éclairages doi­vent être en coordination avec le son. En même temps, il est intéressant de remarquer ce glissement du sens qui s’opère à l’intérieur des thèmes développés par la musique de danse si, à.l’origine la disco servait de véhicule à des messages purement sexuels (tantôt sublimés, tantôt à la limite du cru, parfois), c’est qu’elle correspondait à une nécessité sociale ou qu’elle en était la conséquence, la suite logique de la libération du corps qu’il fallait canaliser. En effet, aux débordements de n ‘importe quoi façon “Je-m’exprime-avec-mon-corps-sur-des-rythmes-qui-signifient-combien-je-sais-rn’en-servir”, véhiculés par les courants de musique dite “progressive”, se substituent désormais des “figures de danse”. Ie carcan imposé par le rythme binaire de la disco justifie l' exercices de style, c’est à dire qu’on juge désormais le danseur sur sa faculté às’approprier une structure rythmique rigoureuse et dont on peut difficilement sortir. C’est d’ailleurs à la même époque qu’on commencera à juger ringards les déhanchements hystériques — mais ce n’est que le commencement.

Pour l’heure, la disco ne parle plus de sexe, mais d’elle-même. Le sexe est acquis, il est évident, pourquoi en parler? La façon dont la disco se met à s’exprimer sur ses propres mécanismes est le signe immédiat d’un genre qui triomphe, qui s’observe, tout comme le roman est devenu nouveau-roman avant de devenir stérile lorsqu’il s’est regardé s’écrire. Allez, faisons dans la nouvelle critique universitaire: la disco est devenue un discours autour d’elle-même, un(e) meta-disco(urs)... 78 est l’année de la disco-madness. Paris vit au rythme des fêtes de Fabrice Emaer et New York au rythme de celles de Steve Rubbel.
Amanda Lear

Les clubs sont remplis de milliers de personnes, perdues dans la musique et les lasers, gesticulant sur le même rythme comme dans un rite similitribal. Pour la première fois, le monde de la nuit paraît accessible à tous. Au Palace, tandis qu’une immense boule de néons descend jusqu’à presque toucher les mains levées des danseurs, Fabrice fait défiler sur un écran géant des photos de gens ordinaires — quand ils ne sont pas carrément laids — qui précèdent l’apparition d’un immense miroir occupant le fond de la salle. Le message est simple “Vous avez vu les autres. Maintenant, voici vous. Vous êtes beaux, vous êtes privilégiés “Un message qui aboutira à la création au sous-sol du Palace d’un club plus restreint, Le Privilège. Le Palace, c’est le grand club que chantera Amanda Lear l’année suivante dans “Fashion Pack” (“In Paris, you’ve got to be seen at Maxim’s/ Le Palace, le Sept and then go Chez Régine”). Pour l’heure sort son album “Sweet Revenge”, avec l’imparable hit que sera “Follow Me! Follow Me-Reprise”. Elle est produite par des Allemands de l’écurie Moroder (Thor Baldursson et Harold Faltermayer, qu’on retrouvera au pupitre de Donna Summer en 1988 —Dinner With Gerschwin” et du “So Hard” des Pet Shop Boys en 1990). Moroder qui produit les Three Degrees sur leur album “New Dimensions”, dont est extrait le hit galopant “Givin’ Up, Givin’ In”. C’est également d’Alle magne que provient une autre androgyne, Gina X, dont le “No GDM” (“No Great Dark Man”, hommage à et d’après Quentin Crisp) connaîtra de beaux jours électroniques grâce à la production de Zeus B. Held, son mari, également dans la mouvance de la Mùnich Machine. Dans ce tourbillon commercial, la France est toujours très bien placée. On parle alors du French Sound, grâce au succès de “Souvenirs” ou de “Let’s Fly Away” de Voyage (N01 aux USA) ,“Born To Be Alive” de Patrick Hernandez, “Spacer” de Sheila (produit par Chic !), “Miss Broadway” de Belle Epoque tandis que Morali réussit une année prestigieuse avec “Macho Man” et “YMCA” de Village People, leurs plus gros tubes mondiaux.

Outre-Rhin, Kraftwerk compose à son tour l’hymne-disco le plus acerbe de l’année. C’est l’album “Man­Machine”, qui recèle le tube “The Model” et analyse froidement le phénomène des clubs avec “Man-Machine”, ‘The Robots” et “Neon Lights” — qui sort en pressage transparent et fluorescent — analyse déjà annoncée par “Les Mannequins” l’année précédente “Nous entrons dans un club! Et commençons à danser! Nous sommes les mannequins...”. Tout le monde veut un beat disco, même Dalida avec “Generation 78”! Ce succès provoquera, pour les années à venir, une fascination de la disco pour tout ce qui est français. Les groupes américains volent des noms français (Musique, Chanson), au­jourd’hui considérés comme le parangon du kitsch et Grace Jones, qui a son premier hit avec “La Vie En Rose”, le chante à l’inauguration du Palace. La pop elle-même se lance dans la disco et, à ce titre, “Heart 0f Glass” de Blondie et “Do You Think I’m Sexy ?“ de Rod Stewart font figure de précurseurs audacieux, au point d’être aujourd’hui réédités dans des collections de Dance-Classics.
La même année voit la naissance d’un label encore obscur, Mute, dont le boss, Daniel Miller, compose “Warm Leatherette”, une disko radicale et ultra-minimale qui préfigure les balbutiements de la techno-pop et de ses futures méta­morphoses. Pour des millions de per­sonnes, 78 représente une période fastueuse, pleine de changements et de découvertes techniques. La libération sexuelle bat son plein et la disco est le tond musical de cette révolution. C’est un gotaen age financier pour les maisons de disques qui réussissent des chiffres d’affaire faramineux. Des disques comme “I Love The Nightlife” d’Alicia Bridges célèbrent cette joie nocturne et les maxis sortent avec des vinyls multicolores.
::1979:: And the beat goes on ! Avant le backlash, la disco vit sa dernière année de folie collective. On sent que le retour de bâton n’est pas loin et les producteurs noient littéralement le marché discographique dans une course désespérée vers le jackpot. Une pléthore de tubes intemationaux sortent des cerveaux allumés des compositeurs disco “Ring My Bell” d’Anita Ward, “Boogie Wonderland” ‘Earth, Wind & Fire, “Everybody Get Dancing” des Bombers, “Carwash”, de Rose Royce, “Dancer” de Gino Soccio, ‘Disco Nights” de GQ, “Keep On Dancing” de Gary’s gang, ““Heaven Must Have Sent You” de Bonnie Pointer, ‘The Second Time Around” de Shalamar, “Haven’t Stopped dancing Yet” de Gonzales, “Groove Me” de Fern Kinney,‘Knock On Wood” d’Amii Stewart, “Cuba” des Gibson brothers, “You Stepped Into My Life” de Melba Moore, ‘Wear It Out”, de Stargard, “Whatcha Gonna Do With My Lovin”’ de Stephanie Mills, “Get Up & Boogie” de Freddie James, etc., etc. Cependant, le Philly Sound reste encore très bien représenté avec les indémodables classiques que sont “Was That Ah It Was” de Jean Carn, “Ain’t No Stopping Us Now” de McFadden & Whitehead et “Strut Your funky Stuff’ de Frantique.

Pourtant, un nouveau courant musical apparaît avec le funk, une forme plus club et agressive de R&B américain Prince obtient son premier succès avec “I Wanna Be Your Lover” et d’autres disques annoncent une nouvelle direction, plus traditionnelle et authentique I got My Mind Made Up” d’Instant Funk, “And The Beat Goes On” des Whispers, “Oops Up” du Gap Band et “Hot Stuff” de Raydio. L’électronique n’est pourtant pas délaissée. Le frénétique “N01 Song In Heaven” des Sparks, “Oh La La” de Susy Lane (produits par Moroder), “Magic Fly” de Space et “Plasteroïd” des Rockets (deux disques 100% français, pour le meilleur et pour le pire), “The Locomotion” de Ritz, “E=MC2” de Giorgio Moroder capturent l’inépuisable fascination du public pour tout ce qui est cybernétique et spatial, tout comme le robotique “Metal” de Gary Numan, qui ravit les nightclubbers. • Dans les clubs passent de plus en plus d’instrumentaux et ces titres, comme “Rise” et “Rotation” d’Herb Alpert, “Morning Dance” de Spiro Gyra, “The Groove” de Rodney Franklyn, ou “I Zimbra” des Talking Heads, produit par Brian Eno, annoncent une fusion inimaginable entre le jazz, l’électronique et la dance-music. Ils sont, pour l’époque, réellement novateurs et, comme “Underwater” d’Harry Thuman, semblent créés pour remplir les immenses clubs de la fin des années soixante-dix.

Ces disques, comme “The Break” de Katmandu, qui sortira l’année suivante, annoncent la domination de plus en plus évidente de l’orchestration sur les voix. Avec l’avènement du jazz-funk anglais (Freez, Lynx, Rah Band), ces morceaux paraissent plus “modemes”, avec des sons plus carrés. Ils prouvent aussi l’éducation du public disco, qui se trouve de plus en plus attiré vers des genres qui ne sont pas nécessairement proches, d’où le succès du “Pop Muzik” de The M. et de “Moskow Diskow” des Belges de Telex qui récupèrent le travail produit par Kraftwerk l’année précédente. Avec le “Trans-Europ-Express”, de ces derniers, ces deux simples sont, encore aujourd’hui, des hymnes disco internationaux, avec leurs paroles cosmopolites qui capturent totalement l’esprit de l’époque et célèbrent le monde de la dance “London, Paris, Mtinich Everybody talk about pop-muzik” (“Pop Muzik”), “Sitting in the Moskow train, heading for the Tokyo-Main” (“Moskow Diskow”) et “Leave Paris in the morning, mit TEE. Jn Berlin, meet Jggy Pop und David Bowie” (“Trans-Europ-Express”). N’oubliôns pas aussi le raz-de-marée ska, avec “The Selecter”, “Too Much Pressure” et “On My Radio” de The Selecter, “One Step Beyond” de Madness ou “Gangsters”, des Specials, une tendance qui ne durera que quelques mois.

Mais le groupe le plus important de l’année est, sans nul doute, Chic. La sortie de leur troisième album, “Risqué” fait de Bernard Edwards et Nue Rodgers les leaders d’une disco efficace et pourtant raffinée. Chic est le premier groupe à évoluer intelligemment de la disco pour obsédés sexuels (la pochette de leur premier album, “Chic”, était typiquement obscène et misogyne) vers une disco quasi-universelle, respectée par la pop comme par le rock. “Good Times”, avec ses lignes de basse mélodieuses, ses arrangements de violons en lames de rasoir, ses motifs de piano à queue et ce clapping irrésistible, va devenir le morceau-phare de la scène new-yorkaise, entraînant le succès de “Rapper’s Delight” des Sugarhill Gang, le disque qui va révéler la première génération du rap. Chic est aussi le premier groupe de disco à proposer des paroles intelligentes (“My Feet Keep Dancing”) et cette délicatesse se retrouve dans le succès de “We Are Family” de Sister Sledge, la même année.

On comprend alors que, s’il reste toujours un créneau pour la disco délicieusement lobotomisée à la “Love & Desire” d’Arpeggio, un courant est en train de se former, marqué par le retour de Diana Ross avec “The Boss”, produit par Niekolas Ashford et Valerie Simpson et du “Love Is Back” de Love Unlimited, produit par Barry White. Même Donna Summer recentre son registre, avec le succès plus middle-of-the­road de “Bad Girls”,”On The Radio” et “Enough Is Enough (No More Tears)”, en duo avec Barbra Streisand, en l’espace de quelques mois, sans pour autant délaisser son producteur fétiche (Moroder). C’est sur ce double-album, cheap et glitter, probablement l’un des derniers grands Donna, que se trouvent “Hot Stuff’, le bizarre “Our Love” et surtout le jumeau du “Fashion Pack” d’Amanda Lear, l’hymne Nightclubber “Sunset People”, nième célébration du monde de la nuit, du clinquant et des paradis hors d’atteinte comme le Sunset Boulevard du logo de Casablanca Recs. “Late-nightflight—LA X— limousine. Andyou’re ail set for Sunset” et de ceux qui ne sortent des discos qu’une fois l’aube venue.

Le renouveau de la soul classique et le recentrage de la production flamboyante des trois années précédentes est vu par les fans disco comme un mauvais présage. Ce recours au self-control musical et visuel est totalement impossible dans le monde déchaîné de la nuit. Le fait que même Donna Summer apparaisse désormais plus californienne que munichoise, voilà qui change toute l’optique de la disco. Les disques de Giorgio Moroder possèdent de plus en plus de guitares dans leurs arrangements (sacrilège!) et on finit par comprendre que l’on perd, lentement mais sûrement, le producteur le plus onginal du genre, tandis que les maxis évoluent à leur tour, en offrant — timidement, d’abord — en face B une version instrumentale de la chanson présentée en face A.

RockandFolk.Planete Dance 1991 (DidierLestrade/Pascal Raciquot Loubet)

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